Car le monde et les temps changent

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Publié parVia Prévention Catégorie
Image : Steve Bouchard

Par Samuel Laverdière pour le magazine Transport Routier, Novembre 2021

20 novembre 2016. À cette date entrait en vigueur la modification au Règlement sur les normes de sécurité des véhicules routiers et ainsi, la ronde de sécurité (RDS). L’automne 2016 a été la période la plus occupée de Via Prévention en 35 ans d’histoire, croyez-moi!

Des questions d’interprétation, d’application, de validation de documents, des demandes de formation et, bien sûr, des demandes d’aide technique de toutes sortes, ça a été notre quotidien chez Via Prévention. Ce mois-ci, revisitons la RDS en prenant en compte deux notions: la résistance au changement et la présomption.

La résistance

La résistance au changement, c’est «l’expression implicite ou explicite de réactions de défense à l’endroit de l’intention de changement» (Collerette, Delisle et Perron, 1997). Vous avez probablement constaté un de ces quatre exemples de résistance face au changement avec la venue de la RDS :

  • Inertie: la personne donne l’impression qu’elle accepte le changement alors qu’elle n’a pas l’intention de bouger d’un pouce. Elle attend que ça passe, se désintéresse du sujet et procrastine.
  • Argumentation: la personne réfractaire se manifeste par des négociations, des critiques et des plaintes constantes. Pour elle, tout est sujet à débat.
  • Révolte: résistance dans l’action. Attitude de refus et d’hostilité.
  • Sabotage: sous couvert d’acceptation, la personne fait tout pour ridiculiser le changement dans le but de protester et de provoquer un échec.

Et ne nous mettons pas la tête dans le sable: ce n’est pas un concept applicable seulement aux travailleurs! Un changement aussi majeur que la ronde de sécurité a affecté l’ensemble des transporteurs. Faites votre propre introspection.

Je vous confirme que, pour ma part, j’ai rencontré plus d’un gestionnaire qui faisait de l’inertie et de l’argumentation. Sans aller dans les détails, que contiendrait un bon plan de gestion pour remédier à la situation? Les principes généraux à appliquer sont, par exemple: placer le personnel au cœur de la réflexion, communiquer efficacement et élaborer des plans d’accompagnement. Ce qui est important de retenir, c’est que tous ces exemples sont des principes implicites à une planification stratégique.

Ne rien tenir pour acquis

Un autre constat qu’on peut faire, après cinq ans de RDS au quotidien, c’est qu’il faut toujours remettre en doute nos connaissances et notre capacité à appliquer la réglementation. En toute sincérité, combien de chauffeurs de votre organisation estiment réaliser une ronde de sécurité complète, chaque jour? Quelle proportion des chauffeurs de votre organisation procède à des vérifications «instinctives», une fois sur la route? Combien sont en mesure d’effectuer le test complet pour le système de freinage pneumatique?

Mon but n’est pas de dénigrer les chauffeurs. Au contraire, le métier de conducteur de véhicules lourds est complexe, notamment en ce qui a trait à l’application des lois et des règlements. Il ne faut donc pas se contenter de présenter «la nouveauté» sans s’assurer que la base est solide. Clairement, en novembre 2016, cette notion a ajouté de la turbulence à l’arrivée de la ronde de sécurité.

Cinq ans x 365 jours = 1 825 jours. Je sais bien que les chauffeurs ne travaillent pas tous les jours, mais ne serait-il pas intéressant de les tester sur leur performance et leurs connaissances de la ronde de sécurité, par exemple? Force est de constater que, quand on regarde les statistiques canadiennes des campagnes Roadcheck, il y a des lacunes dans les inspections quotidiennes et l’entretien préventif des véhicules lourds. Ainsi, le principe de ne rien tenir pour acquis, ce n’est pas se fier sur la perception des chauffeurs face à leur propre performance. C’est d’évaluer la situation et de leur fournir les outils pour qu’ils soient en mesure de respecter la réglementation.

Un des prochains changements réglementaires majeurs attendus concerne très certainement les dispositifs de consignation électronique (DCE). Comme entreprise de transport, mieux vaut planifier et se préparer d’avance afin de gérer efficacement la future et probable résistance au changement et de prévenir les réactions défensives en période difficile, sans oublier de solidifier la base de connaissances de tout votre personnel.